Sorts et ressorts de l’habitat individuel en Île-de-France

Avec 1,5 million de logements, le parc d’habitat individuel francilien, loge aujourd’hui un peu plus d’un quart des ménages de la région. C’est une forme d’habitat désirée et souhaitée par une grande partie des Français et qui permet d’accueillir des populations aux profils divers. Manque de mixité générationnelle et sociale (risque de clubbisation), dépendance à l’automobile, empreinte environnementale, l’habitat individuel est souvent combattu par certains élus, environnementalistes et urbanistes. L’émergence de la loi climat et résilience amplifie ces oppositions avec d’un côté l’objectif de réduire l’urbanisation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, et de l’autre celui de poursuivre la construction de logements en France en intensifiant l’existant. Face aux injonctions contradictoires l’équation paraît difficile à résoudre : comment continuer à construire près de 70 000 logements de qualité par an en Île-de-France qui répondent aux besoins et aspirations des franciliens, sans urbaniser et artificialiser des espaces naturels et de pleine-terre ? Comment loger les ménages, notamment les plus modestes, en évitant leur éviction vers des territoires plus éloignés ? Comment préserver les qualités de l’habitat individuel ?

Face à un débat souvent stérile et parfois caricatural, cette étude permet de mettre à plat les questions et les enjeux qui entourent l’habitat individuel, de leur construction jusqu’à leur mutation les plus récentes.

Il existe de multiples formes d’habitat individuel qui se différencient par leur localisation, leur époque de construction, les outils réglementaires et juridiques qui ont accompagné leur développement et qui accompagnent encore aujourd’hui parfois leur gestion. Tous ne sont pas sont soumis aux mêmes problématiques (rénovation énergétique, dégradation, transformations bloquées par des règlements…).

Le parc individuel, souvent occupé en propriété, est un parc où la mobilité résidentielle est parmi les plus faibles. 39,9 % des pavillons sont ainsi occupés depuis plus de 20 ans en 2018. Par rapport à l’habitat collectif, on observe également une surreprésentation des personnes âgées de 40 à 64 ans (56,9 % en 2018), et une augmentation de la part des occupants de maisons individuelles âgés de 65 ans et plus, passée de 25 % en 2008 à 28,8 % en 2018 (+ 3,8 points). L’habitat du nord-est parisien est occupé par des classes plutôt modestes, à l’inverse de l’ouest, où les ménages aisés sont davantage présents.

À l’heure du Zéro artificialisation nette, on note que le logement est le deuxième secteur le plus consommateur d’espaces en Île-de-France. Même si le mythe du lotissement construit en extension est présent dans les imaginaires et les discours politiques, il est peu présent sur le terrain en Île-de-France. Seules 15 % des surfaces urbanisées pour du logement sont de l’habitat individuel. Il n’en demeure pas moins que cette forme d’habitat est peu efficace en termes d’utilisation du foncier : 25 % des logements individuels construits ces dernières années ont été réalisés sur des espaces naturels agricoles ou forestiers.

Les espaces d’habitat individuel ne sont pas non plus des espaces statiques et hors marché. La transformation de certains est déjà à l’œuvre. Depuis 2003, près de 5 % des espaces alors existants ont fait l’objet d’un projet. En petite couronne parisienne, il s’agit principalement d’un recyclage du tissu individuel au profit d’habitat collectif. Ces projets de plus en plus denses conduisent à des transformations importantes des tissus du cœur de la métropole. Aujourd’hui, près de 6 000 logements collectifs sont construits chaque année à la place d’espaces d’habitat individuel. La densification douce produit quant à elle environ 4 500 logements individuels par an.

En croisant une approche historique (formes urbaines et outils juridiques), sociale et immobilière (dynamiques de transformation en cours), l’étude permet de faire émerger cinq « trajectoires » des tissus d’habitat individuel franciliens, distinguant l’habitat individuel patrimonialisé, dégradé, réinvesti, immobile et densifié.

Année de parution : 2022

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